Merci à Jean-Paul Gavard-Perret pour cette magnifique critique du recueil d'aphorismes de Nicolae Petrescu-Redi sélectionnés et traduits par Amalia Achard, Larmes au périscope ! Elle est parue sur le site lelittéraire.com et je la reproduis ici.
Nicolae Petrescu-Redi, Larmes au périscope
Ou la joie du fou
Amalia Achard ne s’est pas contentée de traduire ces aphorismes : elle en a fait une judicieuse sélection en refusant d’offrir un thème directeur qui nuirait à la propédeutique du poète roumain.
Les aphorismes de Petrescu-Redi en effet embrassent le monde dans une suite de déclinaisons.
Le lecteur pourra y trouver sa propre sagesse là où la forme la plus ramassée ne déforme pas la pensée mais la tord : “Agenouillé, le flatteur joue au nain qui observe les géants”, et soudain tout est dit de ces empailleurs qui rêvent d’être empaillés mais qui, pour l’heure, se tiennent au rang d’orpailleurs faussaires.
Petrescu-Redi n’est pas habité comme Cioran d’une radicalité qui, parfois, le caricatura. Son “héritier” est plus souple et sa pensée reste plus critique qu’existentialiste. Le poète demeure sensible aux faux semblants qui pourrissent le monde : “On accueille les pauvres à bras ouverts. C’est à dire les mains vides” ou encore “certains bâtissent des passerelles mais ils minent les ponts”. Si bien que tout un état de l’existence “chorale” ou plutôt dissonante est tissé.
Ce n’est pas forcement l’occasion d’une fête mais les mots sont justes, les comparaisons et les images judicieuses. Il est vrai que Petrescu-Redi a trouvé sans doute dans l’aphorisme son genre d’élection. Il reste un poète de la concision et qui, la soixantaine finissant, a atteint cette “joie du fou” qui n’attriste plus le sage mais fait de ce dernier celui qui a appris à sortir des retranchements pour s’affirmer (et le monde avec) sans peur et en se moquant des reproches que les pisse-froid pourraient lui adresser.
L’aphorisme dans sa briéveté permet donc à la lumière de s’élever en un volume condensé où nagent les mots. Ils ont scié ici les cordes qui les retenaient aux lourdeurs des discours. Mais, pour en arriver là, c’est toute une histoire de vie et d’écriture.
Jean-Paul Gavard-Perret
Un grand merci de ma part et de la part de l'auteur, Nicolae Petrescu-Redi qui ne parle pas le français pour pouvoir le faire personnellement, à monsieur Jean-Paul Gavard-Perret et à vous, Michel!
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