Márcia Marques-Rambourg, auteur de "Quadrilatère" (à paraître), nous offre cette critique littéraire des "Poésies" de Kieran Wall
Les lignes de Kieran Wall nous suggèrent, ainsi, au-dessus le plaisir esthétique de la lecture musicale – et quelle finesse formelle dans ses mots ! –, un long et fertile voyage à l’intérieur du modus operandi de ses vers logiques et « pierreux ». Elles nous suggèrent une vision, une sensation transcendantale, un moment de jouissance intellectuelle où les mots se marient à des états mentaux de plus en plus sophistiqués et exigeants dans l’acte de l’interprétation. Ce que l’on observe dans la poésie de Wall – et de façon très agréable – ce n’est pas tant les mots poétiques où le lyrisme purement musical dominerait le ton de la lecture, mais un lyrisme «calculé » où les impressions reçues reposent sur un lit de couleurs, de paysages, de figures ouvertes, de personnages à recréer.
Dans sa « poésie » numéro 63, nous lisons :
« La pluie sermonne les bourgeons
Et leurs couleurs en couches ;
Les vitres sonnent à chaque touche.
À chaque goutte nous gageons
De n’être que la solution de tout ce qui nous pousse. »
Ici, outre les effets de langage (les allitérations bien heureuses, comme « couleurs », « couches », « touche », « goutte », « gageons », « solutions », « pousse » entre autres figures rhétoriques), le poète nous montre une fenêtre ouverte où la peinture et la musique se marient quasi instinctivement, et l’expérience textuelle se remplit de blanc, d’espace vide, de silence, et de sensations chargées.
En parcourant les « poésies » de Kieran Wall, on se doit presque de redessiner ses rues bretonnes, de revivre ses jours opaques d’hiver gelé, le mouvement quasi surréaliste des paysages vus, les pas trébuchants d’un flâneur baudelairien ; les marques des vies, de gens, des amours qui vivent encore sur ses pages.
Sa poésie est ainsi un champ. Un champ mouillé de mots et de vers, calculé dans le travail de l’observation et dans l’amour valéryen des Paroles musicales.
« Entre les arbres se nouent des nimbus laiteux,
Exécutant sans fin leur lente transhumance,
Des formes où le ciel perd un peu de sa clémence
Entre tous les gris d’un azur infructueux. » (p. 136)
Márcia Marques-Rambourg
Merci pour cette critique, qui sans être trop élogieuse, met habilement le doigt sur les mécanismes et articulations de "ma poésie".
RépondreSupprimerMerci Marcia,
Kieran WALL