Amalia Achard nous offre une critique poétique de 42 et quelques chansons, de Loup-Yves de Minectro
42 et quelques chansons… pour faire renaître l’espoir perdu
Avec son recueil “42 et quelques chansons”, le jeune poète Loup-Yves de Minectro surprend dans tous les sens.
Il prend la liberté de faire danser les mots selon un rythme à lui, propre, et nous entraîne dans sa musique – un jazz de la poésie.
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“Extinction de l’être” - le chapitre qui ouvre la parade -, aborde à la fois et d’une manière conséquente, la préoccupation du poète pour l’état actuel de la société irraisonnable et exaspérément niaise, (est-ce que Cioran avait raison de croire que « l’homme est le cancer de la terre » ?), ainsi que la question existentielle sur laquelle, depuis toujours, l’Homme n’arrête pas d’investiguer.
Loup-Yves de Minectro affirme, dans le poème “Surréalisme illusoire” que l’illusion
« … me fait croire que la possibilité existentielle aurait de la substance ».
Nombre de philosophes (et pas seulement) ont cherché à percer les mystères de l’être et de son existence. Le “pourquoi” semble obnubiler également le poète, le fait souffrir, l’enivre, le perd dans un tourment « d’idées funestes et noires ».
Je m’attarde sur les vers
« Le temps n’est pas passé
Qu’il a vaincu.
Qu’a-t-il gagné ?
Je ne sais plus.
Paraître ou exister ?
Je ne suis plus. »,
du magnifique poème « Pain perdu ». Alors la pensée me porte vers le raisonnement schopenhauerien :
« La vie d’un homme n’est qu’une lutte pour l’existence avec la certitude d’être vaincu. »
J’ai le sentiment que parfois, pour Loup-Yves l’espoir est dans un continuel mouvement de va-et-vient, et il va plus vite qu’il ne (re)vient :
« Les brefs moments d’espoir ne sont pas revenus ;
J’en viens presque à penser qu’ils ne reviendront plus. »
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Les poèmes du chapitre “Bonheurs passagers” nous dévoilent un poète aimant et tendre envers la nature à laquelle, tel un sage stoïcien, il se rapproche conscient que nature et bonheur ne font qu’un seul Être.
Et si l’humain, en général, se sert de la mémoire pour lutter contre l’évanescence du temps, qu’en est-il pour notre poète ? En quoi les souvenirs nous sont-ils bénéfiques ? Et d’abord, le sont-ils ? Se souvenir, ne serait synonyme du regretter, comme le pensait Cioran ? Est-ce le motif pour lequel Loup-Yves admet que l’oubli
« [...] me permet de vivre et d’accepter l’erreur
De ce bonheur tranquille à l’éternelle horreur. » ?
Pourrait-on dire que tant qu’on n’a pas encore trouvé le bonheur, il nous reste un but dans la vie ?
Non pas forcément celui de soi et pour soi, individuel, égoïste, mais peut-être un bonheur collectif. Car c’est une certitude: Loup-Yves de Minectro se soucie gracieusement du bien-être du monde, dans son entier.
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“Colère” est le troisième chapitre du recueil. Loup-Yves y expose justement la colère de se faire instiller la colère et la haine. Âme révolutionnaire, il fait opposition à cette manipulation qui contamine sans cesse tout être humain, faible et aveuglé par un vocabulaire composé de “mantras” robotiseurs. Ses cris d’alarme sont censés nous enlever à cette torpeur à laquelle nous nous sommes abandonnés et où nous gisons, apathiques.
Cette colère chaotique blottie en chacun d’entre nous doit être détournée dans la bon direction, vers le vrai danger qui se trouve en haut de la pyramide sociétale, là où trône l’élite manipulatrice.
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Loup-Yves de Minectro incarne (peut-être même involontairement et inconsciemment) le héros d’une épopée qui nous sert de modèle. Dans sa poésie, il ne parle pas sans rien dire, ou juste pour épater l’ouïe par la musicalité d’une belle suite de paroles. Ses phrases se mobilisent pour créer un souffle épique: effets de reprise, phrases exclamatives, tournures emphatiques, apostrophes, interrogations rhétoriques.
Qui s’interpose entre le poète et son bonheur ?
Dans le monde moderne, la Société, l'Argent ont pris la place des entités maléfiques qui peuplaient l'univers épique d’antan. Pendant que la Nature reste une des images du Bien, auxquelles valeurs, métaphoriquement parlant, nous avons le devoir moral d’adhérer.
Après lecture, je garde incrusté dans l’inconscient un souffle de renouveau, de renaissance, d’envie de combattre, malgré tout. Il me reste un arrière-goût optimiste de constater que nous avons aujourd’hui encore des héros à suivre, nous ne sommes pas seuls, mais tous ensemble ! Et si la vie est une épopée, il serait bien beau que le Bien finisse par vaincre.
42 et quelques chansons… pour faire renaître l’espoir perdu.
Amalia Achard
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