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lundi 22 juin 2020

Critique littéraire de Homo Interneticus

Merci à Marine Rose pour cette superbe critique du recueil de nouvelles Homo Interneticus, de Snowdon King alias Ionuţ Caragea.



L’inaltérable liberté de l’Amour

Je ne m’étais jamais auparavant plongée dans un livre de science-fiction. Le fait que Snowdon King soit également un vrai poète m’a convaincue à tenter l’expérience, car je savais que je ne risquais pas de tomber sur un simple divertissement supporté par un bric à brac d’idées futuristes.

C’est une science-fiction mystique au sens le plus noble qui m’attendait, sous l’intitulé « Homo Interneticus », et j’ai très bien senti que mon cerveau établissait de nouvelles connections pour comprendre la profondeur au sein d’un imaginaire qui curieusement était aussi familier que dépaysant, déroutant.

J’ai trouvé la lecture des nouvelles, dont un nombre important ont été primées, très absorbante et stimulante intellectuellement et spirituellement. La variété des idées et des histoires ne gâche pas la cohérence du message subliminal, car il s’agit d’un faisceau d’étoiles. Tout s’articule bien comme des planètes dans l’univers. Les magnifiques aphorismes distillent aussi leurs chevelures de comètes iridescentes, reliant les vagues de pensées pleines qui en toile de fond sont présentes et contre-carrent un décor de néant.

« Seigneur, j’ai reçu ton message tandis que je me confessais sur le papier. Un lien naquit entre ciel et terre par où je me nourrissais et te téléchargeais en guise de poésie. »

La complexité apparente des ambiances imaginaires et visionnaires permet justement à la simplicité de nous percuter, sous formes de messages essentiels. Certains sont révélés de manière explicite, et la plupart ont besoin d’être décodés par le lecteur, celui-ci a sa part active à jouer pour tacher de comprendre toute la profondeur des mises en scènes établies par l’écrivain, la connaissance secrète qui est comme un manteau d’ombre divin entourant les réalités actuelles et fictives qui sont mises en lumière.

En effet, les faits sont décrits sous un angle de vue que je qualifierais davantage de visionnaire que de futuriste. Au delà d’une vision d’un futur il s’agit encore davantage d’une vision du présent. L’auteur nous révèle ce qui est déjà en marche, palpable, vécu. La virtualité des mondes de pensées qui ne peuvent se retrouver que dans le « Souvenir Commun » ou le lieu sans frontières de l’origine. Les relations et les fantasmes humains qui deviennent de plus en plus robotiques, sous forme de conditionnements...

Finalement on peut éprouver un vertige en se rendant compte que l’actualité se trouve au sein de ces nouvelles qui contiennent autant d’immensité que de reflets d’étaux étouffants.

C’est en effet une sensation étrange qui naît au sein de la curiosité qu’entraînent les récits irrigués par les nerfs de l’essentialité et parallèlement par le sang du numérique et de la technologie - une sorte d’afflux vital dépourvu d’humanité et privé de l’essence même de la vie, mais maintenant les êtres vivants dans une existence vampirisée et déracinée. C’est à l’intérieur de ce contraste entre les messages de l’âme liés à l’originel et les stimulis émanés de la peau des personnages imbibés de technologie jusque dans les mécanismes de leurs propres cerveaux, que naît un choc, semblable à une eau qui jaillit finalement brutalement d’une fissure dans un goudron. Une eau d’une grande douceur qui se libère avec puissance. L’eau qui désaltère les âmes, celle de la connaissance intuitive de l’amour. L’amour, le plus absolu. Celui-ci en effet est dépeint comme la seule chose qui ne sera jamais maîtrisée par le « système », et cette force mystérieuse capable de court-circuiter tous les obstacles et toutes les chaînes pour se libérer soi-même et libérer les autres.

Ce livre est comme une bouée de sauvetage lancée dans la mer de l’humanité, cette bouée n’est autre que celle de la conscience. L’auteur partage avec nous sa conscience illuminée, et ce que nous découvrons et redécouvrons sur nous-mêmes à travers sa plume est une révélation forte, un bélier qui frappe contre la lourde porte de la somnolence collective.

L’humanité paraît certainement en danger de se mettre à tourner en rond comme une multitude de poissons dans un bocal virtuel.

En même temps les visions de l’auteur sont nuancées, elles ne sont pas manichéennes. La connexion - aux deux sens du terme, le sens intuitif et le sens informatique se fondant - entre les êtres favorise des possiblités qui rejoignent l’infini dans l’avant-dernière nouvelle; pour peu qu’un libre-arbitre fortement entravé par un sur-contrôle (où rien ne paraît plus sûr) parvienne à retrouver la voie réelle de l’immortalité.

Marine Rose

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